Les racines

Au cours de la seconde moitié du 19ème siècle, l'industriel américain Benjamin Berkeley Hotchkiss est l'un des meilleurs spécialistes des armes à cartouches métalliques.

L'Exposition Universelle de 1867, où il expose ses fabrications, marque le début de son implantation française. En 1871, le Gouvernement de la Défense Nationale lui demande de soutenir l'effort de guerre contre la Prusse en implantant une cartoucherie en France.

Un premier établissement est alors ouvert à Viviez, dans l'Aveyron. La paix retrouvée permet à B. B. Hotchkiss de recentrer son activité sur la région parisienne.

La société s'installe à Paris même, quai de Jemmapes. Ces locaux deviennent vite insuffisants. L'entreprise choisit alors Saint-Denis pour installer une nouvelle usine. Aux portes de la capitale, la vieille cité royale dispose de nombreux atouts:

- le canal Saint-Denis, ouvert à la batellerie dès 1821, qui rejoint Paris par le canal Saint-Martin.

- des routes, complétées dès 1843 par le chemin de fer, puis en 1871 par le tramway, qui constituent un réseau dense de transport de personnes et de marchandises.

- enfin, la présence d'une main-d'oeuvre locale qualifiée, en partie rompue aux métiers de la métallurgie et de la mécanique générale.


En 1875, B. B. Hotchkiss arrête son choix sur un vaste terrain, au lieu-dit "le Barrage".

En dépit de la disparition de son fondateur, en 1885, Hotchkiss s'enracine. De 1875 à 1903, son activité est consacrée à la fabrication de matériels d'artillerie.
 

L'automobile, une diversification

Au début du siècle, les successeurs de Benjamin Berkeley Hotchkiss ressentent le besoin de diversifier leurs fabrications, d'autant que l'armement connaît alors un marasme relatif. La construction automobile apparaît comme une solution idéale.

En 1903, Hotchkiss sort son premier modèle largement inspiré de la Mercedes de Daimler.

Jusqu'à la première guerre mondiale, les modèles se succèdent, Hotchkiss étant un des premiers constructeurs au monde à se rallier à la formule du six cylindres en ligne pour ses modèles les plus luxueux.

En dix ans, les automobiles Hotchkiss s'attirent la confiance d'une clientèle aisée.

En 1918, Hotchkiss a le vent en poupe. Les bénéfices retirés de la fabrication, entre autre, de la célèbre mitrailleuse permettent d'envisager l'avenir avec optimisme.

Les grandes années de Hotchkiss peuvent commencer.
 

Le temps du juste milieu

À partir du nouvel outil industriel représenté par les nouvelles installations du Boulevard Ornano achevées en 1924, la société met en oeuvre une politique audacieuse. Celle-ci doit tout à la clairvoyance du directeur de la branche automobile, Henry Mann Ainsworth.

Sans succomber à la tentation de concurrencer les constructeurs produisant en grande série, tel Citroën, Hotchkiss entend également se démarquer des spécialistes de la voiture de grand luxe.

Cette politique de "Juste Milieu", incarnée dans l'AM 2, fait la fortune de la firme jusqu'à la première moitié des années trente.

Alors que la quatre cylindres AM 2 est épaulée à partir de 1928 par un modèle à six cylindres, l'AM 80, la renommée de Hotchkiss continue de croître, justifiée par une première victoire au rallye de Monte-Carlo, dès 1932. Cinq autres vont suivre jusqu'en 1950…

Industriellement et commercialement, la réussite est réelle.

Au milieu des années trente, près de quatre mille voitures sortent chaque année des ateliers dionysiens, et incarnent l'idéal automobile de la bourgeoisie française.
 

Les heures difficiles

La crise économique et la montée des périls remettent en cause cette sérénité.

En 1936, la nationalisation de la branche armement est vécue comme une véritable dépossession, doublée d'une inquiétude, par les responsables d'une société dont l'équilibre financier est désormais précaire.

En 1938, la commercialisation de l'Amilcar Compound, voiture légère à traction avant conçue par Jean-Albert Grégoire, manifeste la volonté de conquérir de nouvelles couches d'acheteurs.

Cependant, la politique de réarmement contraint Hotchkiss à se tourner de plus en plus vers les fabrications de véhicules militaires.

Sous l'occupation, le destin de la société connaît une inflexion décisive. Les circonstances amenèrent en effet Peugeot à acquérir une participation importante du capital du constructeur de Saint-Denis. Hotchkiss perd alors une indépendance qui lui avait été toujours acquise.
 

Le triste après guerre

La firme ne renoue avec la voiture de tourisme qu'en 1946.

Étroitement dérivées des modèles d'avant-guerre, les 13 et 20 CV sortent à petite cadence, tandis que Hotchkiss prend pied sur le marché du poids lourd avec le camion PL 20.

En 1949, la signature du contrat engageant la société dans la fabrication du prototype Grégoire R semble indiquer que l'avenir de la firme passe par la future Hotchkiss-Grégoire. Celle-ci est fabriquée aux côtés des Hotchkiss Anjou de 1951 à 1954. Hélas, cette aventure se solde par un fiasco industriel et commercial, qui révèle les faiblesses d'une société inadaptée aux techniques modernes de production.

Un moment en péril, l'entreprise est réorganisée à partir de 1952, alors que le désengagement de Peugeot s'amorce.

Après avoir fusionné avec Delahaye, la nouvelle direction décide d'abandonner la construction de voitures de tourisme en 1954. Hotchkiss-Delahaye est désormais un constructeur de camions, de Jeep, et d'engins spéciaux, dont la survie passe par de nouveaux rapprochements.

1956 voit la naissance du groupe Hotchkiss-Brandt qui fusionne dix ans plus tard avec Thomson-Houston. À partir de ce moment, le nom de Hotchkiss s'efface peu à peu…
 

Le club hotchkiss, une mémoire vivante

Le 1er janvier 1971, l'activité "Automobiles Hotchkiss" trouve son terme au sein du groupe Thomson-Houston-Hotchkiss-Brandt. À cette date, l'intérêt pour les fabrications automobiles de la société est déjà vif chez les amateurs.

Deux ans plus tard, il débouche sur la création du Club Hotchkiss par un groupe de passionnés.

Quarante six ans plus tard, celui-ci a grandi et prospéré. Fort de ses 350 adhérents répartis dans le monde entier, il maintient toujours plus vivant le souvenir de la marque de Saint-Denis.